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Interview d’October Plays U2

October plays U2, groupe belge, est considéré comme l’un des meilleurs groupes de reprises de U2. Il y a quelques années, ses membres ont réussi à reproduire la tournée du ZooTV pour le plus grand plaisir des nombreux fans du groupe irlandais. Nous avons parlé à Marcellin, le Bono du groupe, sur ce que signifie être un groupe de reprise, la relation avec U2, et le possible mimétisme qui peut naître entre l’artiste et le miroir.

- Selon vous, que faut-il pour faire un bon groupe de reprise ?

- Premièrement des bons musiciens ou tout au moins des musiciens qui peuvent travailler pour atteindre le niveau des musiciens du groupe cible. En second, le respect des compositions originales, car le public veut entendre « ce qui est sur le cd », sinon c’est plutôt de l’interprétation et c’est une autre façon de voir. En troisième lieu, être toujours conscients que le groupe n’est jamais qu’un groupe de reprises, il fait donc être humble par rapport à ce qui est produit. Enfin, avoir un profond respect pour le public qui assiste au concert et qui peut soit « adorer » soit « détester ».
- Que recherchent les personnes dans un groupe de reprise ? Pourquoi avez-vous choisi de monter un groupe de reprise ?
- Égoïstement, ce que nous recherchions était de jouer le plus possible et dans de bonnes conditions. Pour nous, les prestations live sont notre but à tous. Rien ne remplacera jamais le contact avec le public. Nous avions tous eu des expériences dans des groupes de composition où c’était la galère pour trouver des concerts et où les conditions n’étaient pas toujours excellentes. C’est donc cela qui nous a poussés à nous orienter vers un tribute band d’un groupe que nous aimions et qui pourrait être porteur.
- Un groupe de reprise peut-il arriver à être plus fidèle au groupe que le groupe en lui-même ?
- Je dirais même qu’un groupe de reprises doit être plus fidèle au groupe. Le groupe original peut se permettre des improvisations ou des adaptations, Simple Minds le faisait souvent lors des tournées d’il y a quelques années. Le groupe de reprises doit rester braqué sur la référence enregistrée. Pour nous, les versions que nous jouons ont été jouées par U2 soit sur un CD soit sur un DVD.
- Un hologramme de Ronnie James Dio va faire une tournée, pensez-vous que les concerts d’hologramme représentent le futur ?
- Qu’on soit d’accord ou pas, je pense que ce genre de spectacles existeront à l’avenir, il y a eu un show avec Elvis, un autre avec Claude François, Dalida et Joe Dassin. Si le public est preneur, l’industrie du show-business en produira. Je pense que si ce n’est déjà fait, il y aura bientôt des spectacles Michaël Jackson, Prince et probablement David Bowie. Inutile de dire qu’en tant que musicien, je ne trouve pas ça très « sexy », mais bon, la pression du business est là…
- Quand vous êtes sur scène, êtes-vous plus Bono ou Marcellin ? Et les autres membres ?
- Je suis Marcellin qui chante du Bono et les autres aussi sont dans le même état d’esprit. Je ne regarde pas des vidéos de Bono à longueur de journée pour copier la moindre mimique ou le même geste. Pour donner une image, Bono et moi avons été plongés dans la même marmite rock n’ roll et nous avons tous deux les mêmes influences. Si par moment, je peux donner l’impression de bouger comme lui, il faut savoir que j’ai toujours bougé comme sur scène depuis plus de 30 ans… Par contre, la pression du public a fait qu’à un moment, nous avons décidé d’adopter un look semblable, pas identique, mais semblable, là est toute la différence.
- Vous avez commencé à jouer dans un groupe de Punk. Comment êtes-vous passé du punk à U2 ?
- En 1979, U2 était assimilé à la vague New Wave / Punk, l’énergie dégagée à l’époque par des titres comme Electric C° n’était pas très éloignée de ce qui existait sur la scène punk.
- Pourquoi avoir choisi le nom d’October ? Cet album n’est pourtant pas considéré comme étant l’un des meilleurs de U2.
- Égoïstement, c’était l’album avec lequel j’ai découvert U2. J’ai de suite été « scotché » par ces ambiances celtiques, ce mélange d’instruments traditionnels et de rock. La voix de Bono y était aussi pour quelque chose, car il y a tellement de ferveur et d’engagement chez lui que ça ne laisse pas indifférent. Cet album est peut-être une pièce très personnelle en fait. C’est peut-être pour cela qu’il n’est pas apprécié à sa juste valeur. Et puis October comme nom de groupe, j’ai toujours trouvé que ça sonnait bien. Ça me trottait en tête depuis des années sans que je n’en aie jamais parlé.
- Comme les membres de U2, vous êtes très impliqué dans les problématiques sociales, notamment celles des réfugiés et de l'environnement.
- Je souligne que j’ai toujours travaillé dans le secteur social et que j’ai toujours été impliqué dans ces problématiques. Ce n’est pas une forme de schizophrénie avancée qui m’a lancé sur ces sujets. Je travaille actuellement dans un centre de réfugiés et voir que U2 sensibilise ou du moins essaye de sensibiliser son public aux tragédies qui existent actuellement me touche au plus haut point. Ces deux dernières tournées ont fait la part belle aux images de la destruction quasi totale de villes en Syrie.
- En 2011, vous avez monté un Zoo TV miniature, si l’on peut dire, étant donné la taille du projet et l’investissement que vous y avez consacré. Pouvez-vous nous raconter un peu d’où est venue cette idée et comment vous l’avez menée à bien ? Qu’avez-vous tiré de cette expérience ?
- Comme pour la plupart des idées, celle-ci est venue par une conjonction d’éléments : une belle salle, la possibilité d’avoir un partenariat, une équipe de fan qui souhaitait se mobiliser autour d’un événement « U2 », notre anniversaire et le 20e anniversaire de la tournée ZooTV de U2. Le tout a engendré le délire du « Zooctober ». Un an de préparation avec une équipe de plus de 20 personnes, cela engendre bien entendu des tensions, des moments de pression intense, des moments de désespoirs, des disputes, et des moments magiques aussi. Ma maison s’est transformée en « Factory » pendant plus de 6 mois et c’est là que se retrouvaient toutes les équipes qui construisaient le show tous les week-ends pendant 6 mois. Le résultat a, je pense, été à la hauteur des espoirs tant pour l’équipe que pour les spectateurs. Tout comme U2 lors de cette tournée, on ne sort pas indemne d’une telle aventure, il a fallu un bon moment pour retrouver notre équilibre. Le groupe a dû se recentrer sur lui même afin de continuer son histoire.
- On dit de vous que vous êtes le meilleur groupe de reprise de U2 en Europe. Que pensez-vous de cette appellation ?
- Ça fait plaisir de l’apprendre. Il y a d’autres excellents groupes de reprises de U2. Il y a peut être le fait que nous avons joué à une after party de concert de U2 et également notre show du ZooTV qui a fait que notre réputation a dépassé les petites frontières de la Belgique.
- Allez-vous voir d’autres groupes de reprise, que ce soit de U2 ou non ?
- La plupart du temps, nous n’avons pas besoin de nous rendre à des concerts de groupes de reprises étant donné que nous avons l’occasion de les voir lors des festivals où nous jouons. J’y allais plus souvent avant que je ne joue dans October en fait.
- U2 savent-ils que vous existez ? Si oui, quelle relation avez-vous avec eux ?
- LA question ! On va partir sur le principe qu’avec tout ce qu’on a fait pour être connu par le plus grand nombre de personnes possibles que U2 a probablement entendu parler de nous. Nous avons envoyé un DVD de notre ZooTV par-dessus la grille de chez Bono en Irlande juste après que son majordome venait de passer. Nous l’avons d’ailleurs entendu revenir sur ses pas pour venir le chercher. On espère qu’il l’a fait parvenir à Bono. Par contre nous n’entretenons jusque maintenant aucune relation particulière avec eux. Je pense que nous ne sommes qu’un groupe parmi tant d’autres qui essaye de reproduire U2 du mieux possible donc, je ne vois pas pourquoi il y aurait plus d’affinités avec nous qu’avec un autre groupe.

Que nous prépare October pour le futur ? Un mini 360° Tour en vue ?
- En tant que groupe tribute, un spectacle basé sur une seule tournée n’est peut-être pas assez accrocheur. Nous avons un public fort diversifié allant des fans d’une période précise à des personnes qui viennent par curiosité. Se restreindre à une époque nous coupe donc d’une partie du public. C’est néanmoins à réfléchir, mais si nous faisons Pop, je dois me mettre à chercher le citron géant ainsi que le pantalon à bulles de Bono dès maintenant.
- Lors d’une tournée de U2, vous participez à tous les concerts possibles, les suivant jusqu’à Montréal. Vous considérez-vous comme l’un des plus grands fans de U2 ? Pourquoi cette passion pour U2 ? Quel est le concert que vous avez préféré de U2 ?
- Je suis un tout petit fan de U2 au regard de certains. Je participe au maximum de concerts possibles. Pour Montréal et Miami, nous avons profité de programmer nos vacances au même moment que la tournée. Les concerts de U2 pour mon épouse et moi nous semblent tous différents, ils nous font vibrer du premier au dernier. Donc, quand ils sont en tournée, on en profite au maximum.
- Votre chanson préférée de U2 ? Et celle que vous préférez chanter ?
- Il y en a beaucoup que j’aime, mais Please a ma préférence sans réellement savoir pourquoi. Elle me fait vibrer un peu plus que les autres. J’aime chanter « Gloria » parce que c’est une chanson où j’ai été complètement sous le charme quand Bono l’a chanté à 4 mètres de moi en 1982. J’aime également chanter « Sometimes uou can’t make it on your own » parce que techniquement elle n’est pas facile et puis parce que Bono y a mis énormément de lui étant donné qu’il l’a écrite pour son père.
- Auriez-vous choisi Brian Eno comme producteur ?
- Brian Eno est quand même une pointure au niveau musical et n’a jamais eu de préjugés pour explorer de nouvelles pistes musicales. C’était la garantie de ne pas se contente de tourner en rond et de reproduire ce qui avait déjà été fait. Sans lui, je pense que la transition plus que brutale d’Achtung Baby ne serait pas arrivée. U2 est subitement redevenu à ce moment un groupe qui innovait.
- Pensez-vous que U2 ait déjà fait un faux pas ?
Tous les groupes font à un moment ou un autre un faux pas ou sont entraînés vers un chemin qu’ils n’auraient pas dû prendre. On a parlé de paradis fiscaux pour les recettes de U2, je n’en sais pas plus que ce que la presse en a raconté. Maintenant, les membres du groupe n’étalent pas au grand jour ce qu’ils font pour des œuvres caritatives. Cela compense peut-être ce qui est épargné de l’autre côté. À ce stade, le capital du groupe dépasse leurs décisions propres. La gestion est réalisée par des sociétés spécialisées. La plupart des gens en Europe qui pouvaient se le permettre ont investi dans des CICAV, est-ce qu’ils peuvent dire ce que les établissements bancaires ont fait de leur argent ? Investissements dans l’armement, investissements dans des pays à la taxation avantageuse, allez savoir ?
- On vous a sans doute classé comme anarchiste en raison d’une revue, Alternative libertaire, à laquelle vous étiez abonné. Vous considérez-vous comme tel ?
- Il ne faut pas voir les anarchistes comme des poseurs de bombes égoïstes et qui sèment la terreur. L’anarchie peut être en fait l’organisation humaine la plus parfaite. L’accord entre tous en se passant d’une autorité supérieure. Un anarchiste est bien plus respectueux de tous les autres et même de l’ensemble de ce qui forme notre environnement puisqu’il intègre le fait qu’il n’aimerait pas qu’on ne respecte pas son intégrité et ses particularités. C’est une utopie qui a même été évoquée par Marx comme étant le stade à envisager après la dictature du prolétariat. Bien souvent on confond l’anarchie (les libertaires) avec les libertariens qui se situent dans la droite ligne d’une certaine pensée américaine reposant sur le fait qu’on ne peut rien interdire à quelqu’un quitte à ce que ses actes portent préjudice à une partie de la population. Trump en est l’exemple actuel.




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